Fantasia 2016 – PALMARÈS et observations

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Voici notre palmarès qui tient compte de presque tous les films japonais et coréens projetés, ainsi que d’une dizaine d’autres dans le volet non-asiatique couvert par Félix Brassard. Cette édition ne passera pas à l’histoire comme étant la meilleure offerte par le festival (du moins pour le volet asiatique), mais quelques perles se sont manifestées durant la dernière semaine.


COUPS DE COEUR KINEPHANOS

A BRIDE FOR RIP VAN WINKLErip-van-winkles-bride-poster

Pour sa vision humaniste, qui met à nu avec candeur la fragilité des rapports humains et leurs mises en scène sociales, le film propose une poésie de l’intime qui va au delà des apparences.

TOO YOUNG TO DIE
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Un récit juvénile coloré qui ne manque pas de fougue, et qui séduit par sa spontanéité. L’histoire propose une critique musicalement ludique du Japon contemporain!

UNDER THE SHADOWSUnder the Shadow poster

Parce qu’il nous rappelle qu’on peut réaliser des films d’horreur terrifiants sans avoir besoin d’une tonne de moyens, en ayant un bon scénario et des personnages attachants.

SHELLEY
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Pour son atmosphère étouffante et son récit qui assume entièrement sa part de mystère.


MENTIONS HONORABLES

THE BACCHUS LADY
Bacchus LAdy

Un portrait touchant sur les aînés en Corée du Sud. Simple, avec des personnages sensibles et crédibles. Une mention à l’actrice Youn Yuh-jung, touchante de vérité!

TRAIN TO BUSAN
Train to Busan

Un film de zombie au rythme effréné, qui fait rire et pleurer, ça n’arrive pas souvent. Un blockbuster coréen angoissant qui a du coeur.

THE WAILINGThe Wailing

Le film n’est pas un coup de coeur, mais mérite certainement d’être souligné. Malgré qu’il soit louangé par les critiques, et qu’il ait reçu le prix de l’AQCC (l’Association québécoise des critiques de cinéma), The Wailing entretient malheureusement certains clichés dans le dernier quart. Jusqu’à ce point, pourtant, le scénario, la photographie, la réalisation et la mise en scène sont magistralement menés, mais…

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Le récit glace le sang et plonge le spectateur dans une longue et lente descente paranoïaque en enfer. Pas le meilleur de Kiyoshi Kurosawa, mais certainement l’un des films efficaces de cette année. Un moins bon Kurosawa est mieux que rien! Mention à l’acteur Teruyuki Kagawa, troublant dans le rôle du voisin dérangé.

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Un scénario plein d’intelligence et de sensibilité et une fort belle direction photo servent à merveille ce film très riche, à l’intersection de l’horreur, du fantastique et du drame familial.

IF CATS DISAPPEARED FROM THE WORLD
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La prémisse est originale et livre un film qui peut lasser par son caractère épisodique, mais qui au final réussit à émouvoir. Encore un film japonais qui traite des relations interpersonnelles, mais cette fois-ci en soulignant leur importance en lien avec des objets et activités du quotidien. Poétique, la proposition mérite le détour.


LA MASTER-CLASS DE DEL TORO

C’est toujours une grande satisfaction de voir un cinéaste d’exception en chair et en os, spécialement quand ce dernier se révèle humble, drôle et généreux. Et, surtout, la passion du sieur del Toro pour les monstres est hautement contagieuse!


MENTIONS SPÉCIALES

BAKUMAN
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Une incursion réussie et dynamique dans le monde des mangakas (dessinateurs de manga). Moderne et rythmé de musiques techno, le film dépeint adroitement la réalité de l’industrie japonaise du manga et la pression subit par les artistes.

WHAT A WONDERFUL FAMILY
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Une comédie à la limite du burlesque qui pourrait faire le sujet d’une pièce de notre théâtre d’été. Divertissant, en brossant un regard cynique mais tendre sur les relations homme-femme au Japon. On pense à Ozu, que le réalisateur Yoji Yamada ne se gêne pas pour citer. Le vétéran Yamada est bien connu pour sa série Tora-san dans les années 70 et 80.


MENTIONS ANIME

HARMONY
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L’adaptation du deuxième volet de la trilogie de romans de Project Itoh, le film rappelle le Ghost in the Shell de Oshii pour ses réflexions philosophiques qu’il suscite, mais sans atteindre le génie visuel de ce dernier. Jamais engageant, mais toujours agréable à regarder, Harmony propose un commentaire lucide sur le Japon et son éthique.

SEOUL STATION
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Un drame social avec des zombies, le film est du même réalisateur que Train to Busan et dans la même veine que ses précédentes animations en termes de ton, King of Pigs et The Fake.


MENTION ARTS MARTIAUX

KILLZONE 2
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Le scénario est étonnamment bien ficelé et arrive même à nous émouvoir. Contrairement à beaucoup de films du genre notre intérêt pour la quête des personnages est soutenu. Les combats n’en sont alors que plus engageants avec des enjeux qui sont clairement établis.


Observations et remarques
*Les observations qui suivent à propos de l’édition 2017 du festival touchent plus précisément l’offre de films asiatiques*. Bien que Fantasia soit considéré comme l’un sinon le festival de cinéma de genre le plus couru sur la planète, la programmation suit forcément l’offre mondiale. À cet effet, le volet asiatique de cette 20ème édition fut relativement décevant, surtout si on la compare avec les années précédentes (les Yuya Ishii, Sono Sion, Mamoru Oshii et Daigo Matsui, entre autres, manquent à l’appel cette année). Les coups de coeur ont été longs à se manifester, mais il y en a! De plus, beaucoup des films projetés étaient déjà disponibles sur Internet. C’est le cas notamment de Killzone 2, officiellement distribué sur Itunes, ainsi que de Bakuman, The Piper, Harmony et même The Wailing disponibles en streaming gratuitement (près du tiers des films coréens et japonais était déjà accessible)! Sans vouloir comparer la situation avec le FFM, j’ai par moment eu la désagréable impression de m’y retrouver, c’est-à-dire devant des oeuvres mineures qui ont de la difficulté à trouver leur public (Lowlife Love, Kiyamachi Daruma, Three, Judge Archer). Aussi, certains films asiatiques n’ont pu bénéficier de plages horaires très avantageuses. Il y avait beaucoup de films intéressants programmés à 17h, mais la palme de la mauvaise programmation revient définitivement au film de Shunji Iwai qui aurait franchement mérité une meilleure plage. Il s’agit de Shunji Iwai, le réalisateur de Swallowtail Butterfly acclamé à Fantasia en 1998! A Bride for Rip van Winkle, d’une durée de trois heures, fut projeté un lundi soir à 22h10, précédé d’un court métrage. Le Théâtre Hall était vide, 80 spectateurs sur 700 sièges. Dommage.

À une certaine époque, les films asiatiques étaient très difficiles à trouver pour le commun des mortels, maintenant la rapidité avec laquelle ils sortent sur le marché ou disponibles en torrent sur le web est effarante. Par exemple, Ip Man 3 et Rise of the Legend, non présentés au festivalsont déjà offerts sur Itunes et même Netflix. On comprend mal aussi, avec une certaine déception, pourquoi Godzilla Resurgence de Hideaki Anno n’a pu faire son chemin jusqu’à nous. On ne doute pas que les programmateurs ont certainement dû faire leur possible! Or, rappelons qu’un festival doit proposer une expérience unique, mais surtout des films qu’on ne peut se procurer d’un seul clic. Il faut susciter chez le festivalier un sentiment d’exclusivité on lui proposant des films qu’il ne pourrait voir autrement, surtout à l’ère où cela ne semble plus déranger personne de regarder ses films sur un Ipad! Peut-être qu’il faudrait moins de films, plus de premières, une sélection officielle claire pour les prix, un programme « rétrospective », par réalisateur, studio, etc. Il faudrait surtout à l’avenir que le festival évite de se disperser, car l’argument des organisateurs de dire que Fantasia est le festival de tous les genres pourrait bientôt avoir ses limites (bien que cet argument en soit davantage un de marketing, le cinéma d’horreur, fantastique et de science-fiction restent bien servi au festival).

Sur une note plus positive, les organisateurs du festival n’ont tout de même pas chômés. Produire un événement de cette qualité avec les moyens dont ils disposent n’est pas de tout repos. Afin de souligner la 20ème édition ils ont invité des figures importantes du cinéma de genre mondialement reconnues comme Takeshi Miike et Guillermo del Toro qui ont tous les deux été honorés, ainsi que Kevin Smith qui nous a gracié de sa présence en venant présenter son film (plutôt moyen) Yoga Hosers. Fantasia est aussi le rendez-vous incontournable des gens de l’industrie locale et mondiale, avec le marché de coproduction FRONTIÈRES où les participants ont l’occasion d’élargir leurs réseaux de contacts, ainsi que le Fantastique week-end du cinéma québécois qui s’intéresse aux talents locaux. Beaucoup de longs métrages québécois ont été présentés, dont King DaveLes écartés, Feuilles mortes et Mon ami Dino qui ont tous été présentés à guichet fermé!

On espère une édition 2017 qui soit un peu plus relevée pour le volet asiatique. En attendant le FNC, les films proposés ici sauront vous sustenter.