FNC – The End, de Guillaume Nicloux

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Un homme part chasser en forêt et se perd. D’abord son chien disparaît, puis son fusil. Marchant dans les bois sans pouvoir retrouver son chemin, sa route croisera celle de personnages angoissants, jusqu’à ce que rêve et réalité en viennent à se confondre.

L’homme, c’est Gérard Depardieu, le monstre sacré du cinéma français, désormais exilé dans la Russie de Vladimir Poutine. Beaucoup de cinéphiles affirment ne plus être capables de regarder les films du grand acteur, du fait de sa présence qui aspire tout et qui ne laisse voir que l’interprète lui-même, et non le rôle. Mine de rien, il s’agit possiblement d’une des clés de lecture pour comprendre The End. Ce qu’on pourrait y voir, c’est moins une simple balade onirique qu’une mise en abyme sur Depardieu lui-même. Son personnage arpente un univers où il n’a plus de repères et où tous lui semblent hostiles. Or Depardieu n’a-t-il pas quitté la France parce qu’il disait ne plus parvenir à se reconnaître dans son peuple, dans son cinéma? Son départ de la mère-patrie n’a-t-il pas déclenché un tollé de critiques, auquel le principal intéressé a d’ailleurs vertement répondu? Divers indices semés ici et là continuent de pointer dans la direction d’un film sur Depardieu, et non simplement avec lui. Par exemple, il est dit à un moment que lui et son chien chassent le sanglier, allusion évidente à Obélix, l’un des nombreux rôles-phares interprétés par l’acteur. Une façon de dire que, comme le personnage du film, Depardieu a bien l’intention de continuer inlassablement son chemin, en engueulant les arbres comme les hommes. Les jeunes gens qu’il croise sur sa route semblent être des spectres à côté de lui, ou plutôt est-ce lui-même qui n’est plus de ce monde, lui qui est devenu beaucoup trop exubérant et authentique pour une société contemporaine de plus en plus habitée par le virtuel et le politiquement correct? Ne connaissant ni la pudeur ni la honte, il n’hésite pas à jouer presque nu, malgré un physique devenu pachydermique. On peut déduire de tout cela que, malgré le rejet et les moqueries qu’il subit depuis un moment, l’illustre comédien ne s’assagira pas de sitôt.

C’est apparemment ainsi qu’on peut voir ce film signé Guillaume Nicloux: comme un doigt d’honneur (métaphorique mais décomplexé) que son interprète principal adresse au genre humain. On aurait toutefois souhaité une réalisation un peu plus éclatée et une intrigue aux développements moins « cartésiens », même si Nicloux parvient tout de même à peindre une ambiance fortement angoissante par moment. Dommage aussi que la fin du film soit à ce point remâchée. Vu le titre, c’est tout de même d’une grande ironie.

Le film est présenté à nouveau ce jeudi 13 octobre à 17h, au Cineplex Odeon Quartier SALLE 17.