FNC 2019 – Adults in the Room, de Costa-Gavras

Cinquante ans après son indémodable classique Z, sept ans après son plus récent film Le Capital, le vétéran Costa-Gavras rallume sa caméra et la braque sur son pays natal, la Grèce, victime comme chacun le sait d’un krach économique sans beaucoup de précédents dans l’Histoire, lequel a débouché sur une crise humanitaire qui peine encore à se résorber plus de dix ans plus tard.

Adults in the Room. Le titre en lui-même est un programme. Les adultes dans la pièce. Costa-Gavras nous amène dans l’épicentre du pouvoir économique (et donc, du VRAI pouvoir politique) européen. Et d’ordinaire, cet épicentre ne se donne pas à voir. En ces temps de politique-spectacle, il préfère rester dans l’ombre, opérer derrière des portes closes. Le scénario est basé sur le livre de Yanis Varoufakis, ministre de l’économie dans le gouvernement formé en 2015 par le parti de gauche SYRIZA, qui tenta de renégocier la colossale dette grecque pour sortir son peuple de la misère. C’est d’ailleurs ce dernier qui est le personnage central du film, où il est interprété avec beaucoup de charisme par Christos Loulis. Et résonne ici comme en écho l’incipit de Z: « Toute ressemblance avec des événements réels, des personnes mortes ou vivantes n’est pas le fait du hasard. Elle est volontaire. » Excepté que le temps des dictatures militaires a été remplacé par celui de la dictature banquaire, une dictature plus feutrée, moins visible, mais tout aussi horrible de par ses conséquences humaines et sociales.

Le sujet, en soi peu spectaculaire, aurait pu donner lieu à un film verbeux et fade. Il n’en est rien parce que Costa-Gavras n’a rien perdu de son sens de la mise en scène ni de sa capacité à rendre ses personnages attachants et à insuffler de l’humour (quoique parfois grinçant) dans son sujet. Adults in the Room bénéficie également du travail d’Alexandre Desplat, sans doute le meilleur compositeur de musique de films de sa génération.

Si on peut reprocher à Costa-Gavras un humanisme parfois naïf (après tout, n’a-t-il pas lui-même appeler à soutenir SYRIZA?), on ne peut certainement pas lui reprocher de ne pas savoir comment faire un bon film. Adults in the Room est une réussite à tous les niveaux.