Introduction : Geemu, media mix, et les études du jeu vidéo au Japon

Volume 5, numéro 1, décembre 2015

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Martin Picard & Jérémie Pelletier-Gagnon
Université de Montréal / University of Alberta

Il est possible d’affirmer sans crainte que l’apport du Japon dans le développement de l’industrie du jeu vidéo est indéniable. Néanmoins, malgré l’impact de jeux et séries tels que Super Mario Bros. (Nintendo, 1985-), Final Fantasy (Square Enix, 1987-) ou Pokémon (Nintendo, 1995-), les enjeux spécifiques du jeu vidéo japonais (terebi geemu ou simplement geemu en japonais) ont su seulement provoquer l’intérêt d’un petit groupe de fans.

Plusieurs facteurs expliquent cette carence, mais il n’y a aucun doute que la différence linguistique est la principale difficulté pour la réalisation de recherches convaincantes sur le marché local. Par contre, un autre facteur important doit aussi être pris en compte (et il est lié en quelque sorte au précédent) : la méconnaissance des études japonaises. Afin de bien comprendre les particularités du jeu vidéo japonais, des connaissances préalables sur le Japon en tant que tel, non seulement sa culture, mais aussi son histoire, son économie, son développement moderne et contemporain, sont non seulement préférables, mais nécessaires. Bref, nous estimons que la position théorique idéale dans le cadre d’études sur le jeu vidéo japonais est à la jonction des études vidéoludiques et des études est-asiatiques.

Évidemment, cette lacune disciplinaire est aussi associée à la position particulière de l’industrie du jeu vidéo, s’étant essentiellement développée dans un contexte mondial. De même, le fait que les études vidéoludiques se sont plus fortement manifestées en Europe et en Amérique du Nord a suscité une compréhension « occidentalisée » du jeu vidéo, et même du jeu vidéo japonais.[1]

En ce sens, à l’intérieur d’une industrie (voire d’un milieu de recherche) que l’on qualifie de mondiale et transnationale, il peut sembler difficile de souligner les spécificités des jeux vidéo développés au Japon, autrement que par des catégorisations qui s’avèrent, après inspection, problématiques. Dès lors, plusieurs questions surgissent :  y a-t-il des différences entre les jeux provenant de pays et de contextes socioculturels précis ? Et si l’on admet des distinctions entre les jeux japonais, américains ou européens, quelles seraient-elles et quelles en seraient les significations ?

Geemu : le jeu vidéo japonais dans son contexte local

Pour répondre du moins en partie à ces considérations, et afin de mieux comprendre le jeu vidéo japonais dans son ensemble, il est, comme il l’a déjà été mentionné ailleurs (Picard 2013), essentiel de mieux connaître l’aspect local de l’industrie du jeu vidéo au Japon. Similairement au travail de Marc Steinberg pour l’anime (Steinberg, 2012), nous devons examiner les conditions économiques et matérielles de l’industrie du jeu vidéo sur le territoire japonais pour saisir de façon plus adéquate l’évolution du jeu vidéo localement, mondialement, glocalement, et tout ce qu’il y a entre. En ce sens, l’émergence de l’industrie du jeu vidéo au Japon est un « développement qui est informé par un ensemble unique de circonstances historiques et matérielles » (Steinberg, 2012, p. xiii; notre traduction) et qui ne peut pas être réduit à l’unique modèle de la mondialisation.

Pour reprendre un discours déjà employé ailleurs (Picard 2013), le jeu vidéo japonais est à l’intersection d’innovations locales dans ses stratégies commerciales (dans le contexte plus large d’une forte culture de consommation), de transformations industrielles à l’échelle nationale (considérant que l’industrie du jeu vidéo au Japon est à l’intersection des industries des médias, de l’électronique, de l’informatique, et du jouet), et de développements technologiques et créatifs (le hardware et le software)  qui furent, par la suite ou en synchrone, établis à l’échelle mondiale et sous un mode de plus en plus transnational, formant une écologie médiatique particulière.

Le jeu vidéo japonais, que l’on peut qualifier par le terme japonais geemu en soulignant ainsi sa spécificité locale, n’est pas lié à une « essence » quelconque (nationale, médiatique, etc.), mais à un marché, ou plutôt des marchés, qui ont donné naissance à une culture, ou plutôt des cultures (et sous-cultures) du jeu, qui sont elle-mêmes fluctuantes et mobiles sous l’influence des structures industrielles (éditeurs/développeurs, fabricants de console, distributeurs, localisateurs, etc.) et des communautés interprétatives (presse médiatisée, communautés des joueurs et des fans de culture populaire, chercheurs universitaires, etc.).

Ainsi, le marché local du jeu vidéo japonais ne doit pas être séparé de l’écosystème médiatique dans lequel il évolue, et notamment à l’intérieur d’une industrie du contenu plus large qui est fortement caractérisée par des stratégies commerciales propres, dont une en particulier, la stratégie de marketing connue au Japon sous le terme media mix (media mikkusu).

Media mix : le geemu dans un écosystème singulier

Une approche pertinente pour mieux comprendre les particularités du jeu vidéo japonais est de mettre en perspective ses diverses manifestations dans le contexte socio-économique du media mix au Japon. Tout en tenant compte des liens privilégiés du jeu vidéo avec le manga et l’anime, l’examen du media mix en tant que tel, et conséquemment de la place du jeu vidéo à l’intérieur de cet environnement, s’avère être une voie fructueuse.

Le media mix, tel que re-conceptualisé récemment par Marc Steinberg dans Anime’s Media Mix (2012), est un terme industriel et populaire qui a énormément évolué. Durant les années 1960, il était employé dans le cadre d’une utilisation pour une variété de médias à des fins publicitaires. Depuis, il est défini comme une pratique de mise en marché d’œuvres interconnectées pour plusieurs médias (manga, anime, films, etc.) et de produits dérivés, généralement à travers la promotion de personnages attrayants (kyara) et d’un univers fictionnel engageant (sekai).

Après avoir fait son introduction dans cet environnement médiatique durant les années 1980, le jeu vidéo demeure, malgré sa présence de plus en plus imposante dans ce système qui tend constamment à le transformer, sous-analysé en ce qui concerne les manières dont ses différents modes de production et de distribution affectent les joueurs (non seulement dans l’activité de jeu, mais aussi dans leurs modes de consommation et leurs pratiques culturelles), et le contenu des jeux.

L’importance d’une réflexion sur le geemu media mix

Dans un texte écrit en exclusivité pour ce numéro, Marc Steinberg poursuit avec “8-Bit Manga: Kadokawa’s Madara, or, The Gameic Media Mix” ses considérations sur l’anime media mix en expliquant bien cette fois-ci l’importance du jeu vidéo dans le modèle du Kadokawa Media Mix qui a émergé durant les années 1980, entre autres à travers la franchise Madara (1987-1997), un des premiers exemples de ce que Steinberg appelle un “gameic media mix”, et que nous nommons ici un geemu media mix, c’est-à-dire où le jeu vidéo se situe au centre de la stratégie transmédiatique. Comprendre les différentes articulations du geemu media mix permet ainsi de mieux cerner les pratiques de développement, de commercialisation et de consommation du jeu vidéo au Japon.

Dès lors, ce numéro spécial vise à combler un manque dans les théories et analyses des aspects (trans)nationaux et (trans)culturels du jeu vidéo à l’intérieur des études vidéoludiques, et ensuite dans les études interdisciplinaires à propos de la culture médiatique japonaise. Car, même si le jeu vidéo et la culture populaire font désormais partie du paysage universitaire, trop peu de publications ou de recherches se penchent sur l’étude du jeu vidéo à travers une perspective “non-occidentalisée”, et encore moins prennent en compte les spécificités du jeu vidéo au Japon. C’est parce que nous considérons qu’une théorie du jeu vidéo japonais manque cruellement dans la sphère académique que nous avons cru important de préparer un numéro spécial sur le jeu vidéo japonais, principalement dans son contexte local, et de rassembler les réflexions proposées par des chercheurs s’intéressant pertinemment à ces questions.

Comme en fait foi le Kadokawa Media Mix Summer de 2014[2] (Pelletier-Gagnon, 2014), de plus en plus de chercheurs et d’étudiants reconnaissent la pertinence d’une approche centrée sur les manifestations locales des industries culturelles au Japon. Par contre, il faut bien sûr reconnaître que les recherches sur le jeu vidéo japonais sont bien plus diversifiées et nombreuses, et elles semblent heureusement émerger depuis quelques années, au Japon comme ailleurs (en atteste la série de conférences “Replaying Japan” co-organisée depuis 2012 par l’Université de l’Alberta et le Ritsumeikan Center for Game Studies [RCGS]).[3]

Alors qu’elles demeurent malheureusement encore trop méconnues en dehors de leur territoire, les études vidéoludiques se développent rapidement depuis quelques années sur le territoire japonais, et un examen de cette progression, même bref, est primordial.

Les études du jeu vidéo et le Japon

Provenant du côté “occidental” des études sur le jeu vidéo, nous avons évidemment un point de vue particulier sur le jeu vidéo japonais, qui peut être différent de celui des chercheurs japonais. Par contre, ce qui est le plus marquant est sans aucun doute la méconnaissance des recherches sur le  jeu vidéo effectuées au Japon. Comme déjà mentionné, ce manque est lié à de nombreuses difficultés.

Dans leur anthologie The Video Game Theory Reader, publiée en 2003, Mark J.P. Wolf et Bernard Perron  soulignèrent déjà le défi dans les échanges entre chercheurs occidentaux et japonais, en affirmant :

Bien qu’il y ait une fertilisation croisée des idées et des débats académiques entre les universitaires d’Europe et des Amériques, il y en a beaucoup moins entre les pays occidentaux et le Japon. Une partie de la raison est la disponibilité des écrits traduits en anglais, ainsi que l’accent mis sur la conception du jeu et la production, par opposition à l’étude académique de jeux vidéo (13; notre traduction).

Cette citation révèle deux choses: d’abord, que la langue est toujours le problème majeur dans l’établissement de cette « fertilisation croisée des idées »; et, deuxièmement, que pour eux il n’y a pas eu vraiment d’études académiques du jeu vidéo au Japon, du moins au moment de la rédaction de l’ouvrage en 2003 – ce qui peut être exact dans une certaine mesure, mais nous nuancerons ceci sous peu.

Dans le paragraphe suivant du même texte d’introduction, ils reconnaissent néanmoins les possibilités d’échanges et de la croissance des études du jeu à l’échelle internationale :

En tout état de cause, le nombre croissant de livres, de périodiques et de conférences sur les jeux vidéo suggère qu’un réseau international de chercheurs de jeux vidéo se forme, et que la théorie du jeu vidéo comme domaine académique est en train de naître. La question reste de savoir quand (et peut-être si) un accord des fondements théoriques et un vocabulaire commun surgira dans la communauté de recherche internationale (13; notre traduction).

Ils avaient raison sur cet aspect, car depuis, les études du jeu vidéo comme domaine académique n’ont cessé de croître, tout comme la mise en place d’un réseau international. À cet égard, probablement le premier grand pas dans ces échanges inter-culturels entre l’Ouest et le Japon est survenu en 2007 avec la conférence DiGRA (Digital Game Research Association) qui eut lieu à Tokyo.

À peu près au même moment, de nouvelles associations et des sociétés d’études de jeu ont commencé à se former au Japon, telles que DiGRA Japan,[4] créée en 2006, et dont une revue scientifique fut lancée en 2007,[5] la même année que la conférence DiGRA à Tokyo. Nous pouvons également nommer l’IGDA Japan (International Game Developers Association, Japan Chapter) ,[6] établie en 2002, mais davantage centrée sur le côté pratique; ou bien The Game Amusement Society,[7] également fondée en 2002 à l’Université Electro-Communication d’Osaka, avec une approche provenant des sciences naturelles et appliquées, et qui a commencé à publier une revue scientifique en 2006;[8] ou bien encore des associations plus larges qui incluent des travaux sur le jeu vidéo, telles que la Japan Association of Simulation and Gaming (JASAG) ,[9] qui possède aussi son journal[10] et son propre colloque.[11]

En ce qui concerne l’importance des liens interculturels, sans aucun doute l’événement le plus significatif est l’inauguration du Ritsumeikan Center for Game Studies (RCGS)[12] en 2011 par les chercheurs japonais de l’Université Ritsumeikan à Kyoto. Leurs objectifs primaires étaient de créer un réseau de chercheurs (de tous les domaines) travaillant sur les jeux vidéo au Japon, mais aussi ailleurs, et de créer un pont entre le milieu universitaire et l’industrie, une relation souvent privilégiée dans les recherches sur le jeu vidéo au Japon.

Néanmoins, ces quelques mentions, parmi plusieurs autres, ne signifient pas pour autant que la recherche sur le jeu vidéo au Japon était inexistante avant les années 2000. En fait, le développement de la recherche sur les jeux vidéo au Japon suivit d’assez près celle de l’Ouest, alors que les premières publications ont commencé à apparaître dès le début des années 1980, pour la plupart des études empiriques liées à des approches psychologiques (voir ci-dessous). Ensuite, le boom de la Family Computer (ou Famicom / Famicon / Famikon) au milieu des années 1980 a occasionné un intérêt supplémentaire pour le jeu vidéo, autant dans les médias que dans le milieu universitaire. Comme les études du jeu vidéo au Japon se sont énormément développées et diversifiées depuis lors, un examen plus approfondi des principales approches est nécessaire.

Bref survol des études vidéoludiques au Japon

Dans le cadre d’un article publié en 2007 pour le premier numéro de la revue de DIGRA Japan, le chercheur japonais Akito Inoue présenta la situation générale de l’étude du jeu vidéo au Japon. En introduction, Inoue signala qu’au moment où la recherche sur les jeux vidéo débuta au Japon, il n’y avait pas de consensus entre les chercheurs par rapport à l’approche à prendre ou quel cadre théorique à adopter afin d’étudier ce nouveau média. Malgré le rôle majeur du Japon dans l’industrie vidéoludique, les chercheurs japonais avaient alors, selon lui, des outils théoriques plus faibles pour étudier le jeu vidéo comparativement aux chercheurs occidentaux. Rules of Play, l’oeuvre marquante de Salen et Zimmerman (2003), fut utilisée par Inoue comme exemple de cadre théorique à adopter (Inoue, 2007, p. 46).

Malgré cela, il existe, depuis les années 1980, une tradition d’études vidéoludiques au Japon. Inoue lui-même divise cette littérature en trois catégories distinctes : le débat entourant la question de l’influence négative du jeu vidéo, la recherche sur le questionnement du jeu vidéo comme média de socialisation, et les travaux de recherche sur le design de jeu vidéo et les études de marché. Cette classification reflète profondément l’appréhension initiale de la communauté universitaire japonaise envers le jeu vidéo. L’accent mis sur l’étude de l’industrie du jeu indique également que l’étude de ce média au Japon a toujours été grandement motivée par des considérations économiques.

Lors des premières années des études vidéoludiques au Japon, la question de savoir si le fait de jouer au jeu vidéo avait un impact physique ou psychologique chez les joueurs, et particulièrement les enfants (An’Ei, 1981; Sakamoto, 1992), captura l’attention de bien des universitaires et scientifiques qui s’étaient mis à étudier le média. Lorsque les arcades et, subséquemment, la Famicon commença à captiver l’imagination et monopoliser les loisirs des jeunes japonais durant les années 1980, les parents commencèrent eux à se soucier de l’impact de ces nouvelles technologies sur l’esprit et la sociabilité de leurs enfants (Kimura, 2003, p. 115). Ces inquiétudes furent grandement reflétées et amplifiées par les médias de masse. La portée de ce bideo geemu akueikyouron (discours de la mauvaise influence des jeux vidéo) fut tel qu’il a teint l’intérêt académique envers le jeu vidéo pour une période relativement longue (Sakamoto, 1993, p.79). Beaucoup de recherches ayant pour objectif de clarifier le degré d’influence de ces jeux vidéo furent menées dans le cadre d’un grand mouvement d’étude de l’impact des médias (incluant le manga et la télévision) sur les schémas de socialisation des enfants dont les jeux furent une part centrale (Fukuya & Fukuya, 1989). Des recherches en psychologie dirigées à l’aide de cadres théoriques et expérimentaux furent entreprises pour comprendre ce qui commençait à être désigné comme le “syndrome Famicon” (Sakamoto, 1992; 1993).

Prenant part à ce mouvement, d’autres chercheurs tels que Rei Shiratori furent amenés à étudier les régulations entourant le contenu de ces jeux à travers cette perspective, par exemple, en menant des recherches comparatives sur les systèmes de classifications des différents pays  (2003). Par contre, le point culminant de cette mouvance fut sans aucun doute les idées contenues dans le livre Bideo geemu noo no kyoufu (La peur du “cerveau-jeu”) par Akio Mori (2002). Le livre présenta les résultats d’expériences électro-encéphalographiques indiquant comment le jeu vidéo pouvait physiquement endommager le cerveau des enfants. Bien que ce type de recherche peut produire des résultats intéressants, le livre de Mori fut largement critiqué au fil des années dans le champ des études vidéoludiques au Japon. Il reçut malgré tout un accueil relativement favorable de la part du public (Philips, 2002). En conséquence, scientifiques et critiques ont, durant les années 2000, souvent ressenti le besoin de questionner les affirmations de Mori dans le contexte de leur travail.

D’autres exemples de ce type de recherche portèrent aussi l’attention sur la manière dont les joueurs interagissent avec les jeux et à tenter de faire la lumière sur le contexte social de l’activité ludique. Un précurseur de cette approche fut Nakazawa Shin’ichi à travers une lecture du jeu Xevious en tant que texte déterminé autant par l’auteur du programme que par les joueurs eu égard à la manière créative dont ils interagissaient avec le jeu (1984; une traduction de ce texte fondateur fait partie de ce numéro). Nakazawa identifia pour le jeu vidéo les mêmes caractéristiques définissant les textes mythologiques, à savoir la capacité à éveiller la curiosité du lecteur envers un récit et à le motiver à vouloir prolonger son expérience à travers un engagement soutenu.

Des intérêts semblables pour l’étude de l’engagement des joueurs envers le média et de la dynamique des relations entre les jeux et les joueurs furent à la base d’autres travaux intéressants. Masaki Sawano montra comment la réception du jeu chez les joueurs se situe sur un plan métaphorique, expliquant que le fait de tuer des personnages sur un écran de télévision ne possédait pas la même charge émotive que dans la réalité (1993). La psychologue Rika Kayama, dans son livre Bideo geemu to iyasu (Jeu vidéo et guérison), reconnut l’impact positif du jeu vidéo chez les enfants, démontrant comment ils pouvaient leur apporter une façon de cultiver une estime de soi positive et d’apprendre la persévérance pour surmonter les défis de la vie (1996). Nakazawa lui-même poursuivit dans cette orientation et publia en 1997 un essai sur la réception complexe de la série Pokémon chez les enfants à travers le cadre théorique de la psychanalyse.

Plus récemment, Hiroyasu Kato publia une vaste étude sur les game centers (arcades japonaises) clarifiant les dynamiques de la socialisation des jeunes lorsque soumise à la médiation de la culture des jeux vidéo spécifique à ces endroits et comment ces derniers pouvaient incarner un troisième espace séparé de la vie scolaire et familiale (2011). De plus, des chercheurs du Ritsumeikan Center for Game Studies (RCGS) ont aussi publié un livre intitulé Famicon to sono jidai (Au temps de la Famicon) dont une grande partie est dédiée à l’analyse de la réception sociale de la console à l’époque du Famicon boom (Uemura & Koichi & Nakamura, 2013). L’étude du jeu vidéo au Japon est constitué de bien d’autres approches diversifiées telles que le regard polyvalent de Yahiro Shigeki sur l’interprétation du jeu (2005) ou les travaux d’Akito Inoue sur les processus de ludification (2011), mais il est possible d’affirmer que les recherches sur la relation joueur/jeu constitue une mouvance centrale de cette tradition.

Une troisième branche de la littérature que nous souhaitons mettre de l’avant est la recherche sur le design de jeu et les études de marché reliées au jeu vidéo, une catégorie qui prît beaucoup d’importance depuis le début des années 2000. L’augmentation du nombre de recherches touchant l’aspect des études vidéoludiques liées à l’industrie est révélateur de l’environnement dans lequel ce champ de recherche évolue au Japon. Les études de marché du jeu vidéo sont très présentes au Japon (Nakayama, 2012; 2013; 2015), tout comme la recherche sur les pratiques et l’économie liées à l’industrie (Saito & Shigihara, 2013; Digitaru geemu kyoukasho seisakuinka, 2014), ainsi que plusieurs ouvrages sur la théorie du game design (Watanabe & Nakamura, 2014). Akira Baba, président fondateur de DiGRA Japan et professeur à la Graduate School of Information Studies de l’Université de Tokyo, s’intéresse dans son Baba Lab[13] à ces relations possibles entre le milieu académique et l’industrie (Rockwell, 2011). Les travaux sur le jeu sérieux attirent aussi beaucoup d’attention grâce à des chercheurs tels que Baba ou Toru Fujimoto, professeur de design de jeux éducatifs à l’Université de Tokyo, et traducteur du livre Reality is Broken de Jane McGonigal (2011). Des figures classiques du design de jeux telles que Masanobu Endo et Toru Iwatani sont aussi présents dans la littérature actuelle de par leur implication à différents niveaux dans plusieurs ouvrages (Iwatani, 2005; Kabushikigaisha mobairu & geemu sutajio, 2012; il est aussi à noter qu’Endo et Iwatani font partie du comité exécutif de DiGRA Japan). Il y a aussi une remarquable quantité de livres sur l’histoire du jeu vidéo, ainsi que des guides pour intégrer l’industrie pour le grand public.

La voix de l’industrie est considérée avec attention au Japon et la collaboration avec des concepteurs ou des éditeurs est bien souvent une méthode que le monde académique emploie pour justifier et mener des recherches subventionnées. Des événements récents dans l’étude du jeu vidéo japonais tels que la création du RCGS à l’Université Ritsumeikan, un projet sensé agir comme une plate-forme de collaboration entre le monde académique et industriel, la série de conférences Replaying Japan, présentant chaque année des conférenciers invités provenant de l’industrie, ou la conférence Press Start qui eut lieu à Vancouver en février 2015[14] sont quelques exemples de cette situation.

De proches collaborations avec l’industrie sont effectivement une façon de mener des recherches à termes sur un média dont l’industrie a appris au fil du temps à ne pas trop dévoiler ses pratiques internes. Par exemple, c’est par une collaboration avec Nintendo et un ancien de ses employés, Masayuki Uemura, créateur de la Famicon et de la Super Famicom, et maintenant directeur du centre de recherche, que l’équipe du RCGS fut capable de publier Famicon to sono jidai. Par contre, comme Inoue le mentionne (2007, p.48), il est vrai que les universitaires doivent conserver un certain degré d’indépendance face à l’industrie afin d’éviter que la recherche sur le jeu vidéo acquière la connotation d’être utile que si elle peut être profitable pour l’industrie. Malgré que cette convergence puisse permettre aux chercheurs un accès à, entre autres, une meilleure compréhension des processus créatifs au sein de l’industrie, les intérêts de cette dernière ne reflète pas toujours toutes les facettes à partir desquelles les jeux et la culture du jeu peuvent être analysés et critiqués.

Mais en transcendant la dichotomie entre la littérature académique et la recherche liée à l’industrie, il est essentiel de reconnaître la communauté des joueurs japonais et leurs inestimables contributions à la recherche. En visitant certains vendeurs au Comic Market, en flânant dans les magasins d’Akihabara ou en faisant seulement quelques recherches rapides sur Internet, un chercheur peut facilement tomber sur une mine d’informations sur le jeu vidéo japonais sous forme d’encyclopédies, de critiques ou d’autres articles de profondeur écrits par des joueurs dédiés, et publiés soit dans des magazines, des fanzines autofinancés ou des pages Web élaborées. Toutes ces ressources, qui surpassent de loin en nombre le travail des universitaires et de l’industrie, possèdent une valeur certaine pour tout chercheur contemporain en études vidéoludiques, entre autres parce qu’elles offrent parfois les premières pistes de recherche d’un futur projet singulier. Certains de ces joueurs agissent aussi comme conservateurs en s’occupant de préserver du matériel qui serait autrement complètement perdu ou introuvable.

La situation est ainsi qu’il existe aujourd’hui une grande variété de recherches offertes par les chercheurs japonais en études vidéoludiques, et il suffit de jeter un coup d’oeil aux conférences annuelles de DiGRA Japan et de Replaying Japan pour s’en convaincre. Mais à l’instar du projet collaboratif de Replaying Japan, les contributions des chercheurs japonais ne pourraient être significatives que dans une relation avec son versant occidental du champ de recherche. Ainsi, ce numéro souhaite participer à cette collaboration, entre autres en offrant des contributions de chercheurs venant principalement de l’important axe trilatéral de l’industrie du jeu vidéo japonais (Japon, Europe, Amérique du Nord), contributions qui nous l’espérons apporteront de nouvelles perspectives sur le jeu vidéo japonais en lien avec les études vidéoludiques.

Des approches théoriques diversifiées

Tout d’abord, ce numéro spécial met en vedette une contribution importante de l’auteur invité Marc Steinberg. Faisant le lien entre le média mix et le jeu vidéo, Steinberg fait la chronique de l’histoire de la franchise Madara, la première expérience média mix entièrement crée autour du langage du jeu vidéo. Après avoir défini la place de Madara dans la division des magazines de jeu vidéo de Kadokawa, ainsi que dans la stratégie média mix à grande échelle de la maison d’édition, Steinberg indique comment le fait de situer le jeu vidéo au centre du média mix influence les dynamiques de convergence des médias. Il nomme ce phénomène le “gameic média mix”.

Tel que le thème de ce numéro le suggère, au Japon, le jeu vidéo est lié de plusieurs façons à un écosystème médiatique plus large ainsi qu’à son industrie créative. Il est crucial d’examiner et de comprendre ces connexions lorsqu’il s’agit d’interpréter les jeux eux-mêmes. Dans “Kawaii Japan: Defining JRPGs through the Cultural Media Mix”, Douglas Schules entreprend de localiser ces relations, en indiquant comment certains jeux se lient au “soft power” japonais et à la manière dont le concept de “kawaii” s’y trouve ludifié. Son article porte sur le jeu Tales of Xillia et ses nombreux DLC (contenus téléchargeables) d’accompagnement. À travers cet ensemble, il fait la lumière sur la façon dont un certain discours de la japonéité est articulé dans les jeux vidéos et leur industrie.

Se distanciant quelque peu de la politique et prenant davantage appui sur l’esthétique, Andrew Campana nous invite à examiner le média mix à partir de la perspective de la porosité entre les médias. Dans Anime’s Media Mix, Steinberg isole et analyse la place des autocollants au sein du média mix créé autour de Tetsuwan Atomu comme un élément central dans la circulation de l’image de ce personnage. Mettant l’emphase sur la matérialité des médias telle que présentée dans la base théorique de Steinberg, Campana nous offre une lecture de la série de jeu vidéo Paper Mario de Nintendo et explique comment ces jeux proposent aux utilisateurs d’interagir avec la matérialité de différents supports médiatiques tels que le papier et les autocollants mentionnés plus haut. “Fold, Flip, Stick: Paper Mario, 2.5-Dimentionality and the Media Mix” met au défi la conception traditionnelle des médias en tant que catégories isolées et souligne le potentiel interactif entre eux.

Un des défis que pose l’étude de la culture du jeu vidéo japonais est, tel que cité plus haut, l’omniprésente barrière linguistique. Considérant la portée mondiale de l’industrie du jeu, une bonne quantité de titres font l’objet de traduction, ce qui facilite la tâche du chercheur, mais qui apporte aussi ses questionnements tels que le degré de légitimité des produits localisés par rapport à leur version d’origine. La localisation est un processus créatif complexe qui touche bien des jeux que les chercheurs étudient. Stephen Mandiberg reconnaît cet état de fait et s’attaque au sujet en proposant de jeter un coup d’oeil informatif dans le monde de la localisation du jeu vidéo à travers l’étude du cas de la traduction de Phoenix Wright: Ace Attorney. Il soutient l’idée que les moments de confusion causés par des différences culturelles que les joueurs ressentent parfois lorsqu’ils jouent à des titres d’origine étrangère (un phénomène nommé “iwakan”) ne devrait pas être compris comme un échec de la localisation, mais plutôt comme des moments qui rendent possibles une forme d’apprentissage culturel de l’Autre. Dans “Playing (with) the Trace: Localized Culture in Phoenix Wright”, Mandiberg explique comment le jeu vidéo permet au joueur de franchir les frontières culturelles.

Malgré le fait que le terme “jeu vidéo” suggère lui-même la primauté de l’aspect visuel de ce média, le son et la musique ont toujours été une partie importante de la conception des jeux depuis les tout débuts de l’industrie. Au Japon, les compositeurs de musique jouissent d’une  notoriété certaine depuis les années 1980. Par exemple, les compositeurs Nobuo Uematsu et Koichi Sugiyama, qui ont respectivement créé la majorité de la musique des séries Final Fantasy et Dragon Quest, ont su surmonter les capacités limitées de la carte sonore de la Famicon pour produire des mélodies qui inspirent encore les joueurs aujourd’hui. Leurs succès les ont éventuellement propulsé au rang de célébrités. Malgré cela, il n’existe que peu d’informations disponibles sur la scène musicale japonaise du jeu vidéo en dehors du Japon; les ouvrages récents sur la musique japonaise, tels que Made in Japan: Studies in Popular Music (2014) dirigé par Toru Mitsui, n’abordent pas le sujet. Dans ce numéro de Kinephanos, Yôhei Yamakami et Mathieu Barbosa nous présentent cet important aspect de la culture du jeu japonais dans “Culture et développement des cultures autour de la « Geemu ongaku » (1980-1990)”. De l’émergence d’une “fandom” de la musique de jeu dans les arcades à la célébration de trames sonores acclamées par tous, comme celle de Dragon Quest, Yamakami et Barbosa font la démonstration que les magazines spécialisés et la presse populaire furent centraux dans la construction de l’image de la musique du jeu vidéo et dans la formation de son public.

Prolongeant la portée des sujets couverts dans ce numéro, les auteurs invités Geoffrey Rockwell et Keiji Amano soulignent bien la diversité du jeu vidéo japonais en nous introduisant au pachinko, une frange importante du lien entre le jeu vidéo et les autres formes ludiques dans un Japon du loisir. Situé à la limite du jeu et du jeu de hasard, les auteurs nous montrent bien comment ce phénomène extrêmement populaire, lorsque étudié sous l’angle de la recherche sur le jeu, apporte plusieurs problématiques intéressantes sur le contexte ludique japonais et sur des questions d’ordre culturel.

Telle que mentionnée dans notre introduction plus haut, la lecture du jeu vidéo Xevious par Shin’ichi Nakazawa présenta aux critiques du jeu vidéo des années 1980 une nouvelle perspective académique profondément ancrée dans la tradition des sciences humaines. C’était sans aucun doute une première à sa parution en 1984. Ce texte fondateur intitulé “The Game Freaks Who Play with Bugs – In Praise of the Video Game Xevious” est offert pour la première fois en anglais dans le cadre de ce numéro spécial de Kinephanos. Les traducteurs, Jérémie Pelletier-Gagnon et Tsugumi Okabe, introduisent le texte en esquissant le portrait académique de Nakazawa et en replaçant Xevious dans le contexte de la culture japonaise du jeu vidéo. Cette traduction est aussi annotée afin d’apporter plus de précisions par rapport au contexte de la publication de l’article pour le lecteur contemporain.

Finalement, le dernier texte de cette collection nous ramène à notre point de départ, l’auteur invité de ce numéro, Marc Steinberg, et son livre Anime’s Media Mix. En effet, la dernière contribution vient de Frédéric Clément sous la forme d’un résumé critique approfondi de l’ouvrage de Steinberg en le situant entre autres au sein de la littérature consacrée aux études médiatiques japonaises.

Nous espérons que les contributions pour ce numéro seront des apports importants autant pour le champ des études vidéoludiques et médiatiques, que pour celui des études japonaises.

Remerciements

Le travail effectué pour ce numéro a été réalisé, en partie, grâce à des bourses de recherche accordées par la Japan Foundation et la Monbukagakusho.

Bibliographie

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Notes

[1] Et sur ce point précis, une certaine conception du Japon, fabriquée au courant de son histoire pré-moderne et moderne, et véhiculée à l’extérieur du Japon (Sakai, 1989; Befu, 2001; Oguma 2002[1995]), a fortement marquée la vision commune de ce qui pourrait être « japonais » dans le jeu vidéo japonais. Nous pouvons mentionner quelques exemples courants tels que l’utilisation désormais répandue de l’acronyme “JRPG” (dont un auteur en analyse la portée dans ce présent numéro) pour catégoriser une certaine forme de jeux de rôle (au préalable en provenance du Japon, mais plus maintenant, en témoignent les nombreuses sorties de jeux indépendants inspirés de ce “modèle”), la caractérisation fréquente des jeux vidéo japonais comme étant très bizarres ou loufoques (on en retrouve une panoplie en ligne), ou bien la perception que le jeu vidéo japonais pourrait être le plus pertinemment défini par l’examen de son “essence” japonaise ou  sa “japonéité” (cette approche a déjà été critiquée dans Pelletier-Gagnon [2011] ou Picard [2009]).

[2] http://kadokawa.iii.u-tokyo.ac.jp/summer2014/

[3] https://sites.google.com/a/ualberta.ca/replaying-japan-2015/

[4] http://digrajapan.org/

[5] http://digrajapan.org/?page_id=336

[6] http://www.igda.jp/

[7] http://www.gameamusementsociety.org/

[8] http://www.gameamusementsociety.org/staticpages/index.php?page=journal_E

[9] http://jasag.org/en/

[10] http://jasag.org/en/category/journal/

[11] http://jasag.org/isaga2015/

[12] http://www.rcgs.jp/

[13] http://chi.iii.u-tokyo.ac.jp/

[14] http://pressstartubc.com/; vous pouvez consulter un compte-rendu de l’événement ici : http://www.kinephanos.ca/2015/japans-mobile-game-moment-summary-of-the-press-start-game-conference/.