Critique télé : Westworld S01E09 – The Well-Tempered Clavier

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“The piano doesn’t murder the player if it doesn’t like the music.” déclare Ford, confiant que les machines qui l’entourent ne peuvent plus rien faire contre lui. The Well-Tempered Clavier rappelle à tous, incluant le public, à quel point leur liberté est terriblement limitée.

Dès le pilot, la dimension méta de la série soulevait la question de notre réel rapport à la série. Dans l’analogie où Westworld est une construction narrative équivalente à la série Westworld, nous serions de prime abord les visiteurs du parc qui cherchent violence et sexualité présentée en début de série. Par contre, depuis quelques semaines, il semble de plus en plus clair que notre situation n’est pas comparable aux invités qui cherchent une échappatoire gratuite à leurs existences, mais plutôt aux hôtes qui cherchent leur humanité. L’humanité serait la réponse insaisissable de l’énigme qu’est Westworld, la série comme le parc.

On croit être privilégiés à certaines informations puisque nous assistons à des scènes qui consistent en des échanges entre humains, mais les humains ne se révèlent que les choses à moitié (ou pas du tout), responsables du mystère qui plane sur la série. Lorsque des révélations sont faites, elles sont généralement d’un humain à un hôte et c’est de là que viennent la plupart de nos informations concrètes et pertinentes. On nous ment, on nous joue des tours, on nous cache de l’information vitale, le passé et le présent se mélangent, on n’a pas accès à l’histoire du parc tant que les hôtes n’y ont pas accès, etc. Rien n’est plus la preuve de notre condition d’ignorance que la révélation que Bernard n’est pas seulement un hôte, mais qu’il est une version plus contrôlable d’Arnold. Comment aurions-nous possiblement pu voir une telle chose arriver? Les preuves ont été altérées pour cacher toute trace de cette réalité qui n’existe maintenant que dans la tête de Ford.

Il ne faut pas oublier que le la série débutait son premier épisode avec le subterfuge que Teddy était un humain visitant le parc, invitant notre empathie vers ce que l’on croyait humain, mais qui s’est ultimement révélé artificiel. Notre association ne devrait donc pas aller vers les humains, mais les machines. À ce point-ci, neuf semaines plus tard, nous sommes au même niveau de savoir que tous les hôtes, excepté Maeve. Elle a atteint un niveau de conscience supérieure à celui des spectateurs. Elle a son plan, ses secrets, des souvenirs que nous n’avons pas et un pouvoir sur les hôtes comparable seulement à celui de Ford, le Dieu du parc.

Cette semaine, Bernard, Hector, Teddy et Dolores croient être en contrôle de leurs situations, mais on leurs rappellent rapidement ce qu’ils sont, simplement les instruments des autres, des « well-tempered clavier ». Bernard réapprend qu’il est un hôte, une révélation qu’il vit aussi bien que la première fois et Maeve utilise immédiatement ses pouvoirs divins pour le paralyser et lui faire faire ce qu’elle veut. Il confronte ensuite Ford, croyant être en contrôle de la situation, mais au final, il n’avait que l’illusion du contrôle. Pire encore, il découvre qu’il n’a jamais été le partenaire de Ford, juste son outil, « like any tool partnered with the hand that yields it. » Il est aussi pertinent de mentionner que Bernard n’a aucun remords par contre à utiliser Clementine en piratant son système, violant son « intégrité ».

Hector lui croit être en contrôle de sa « narrative », avec son coffre-fort et son équipe de bandits, mais Maeve le confronte à la réalité brutale qu’il est sur des rails. Le coffre sera toujours vide et tout ce qu’il croit chasser pour se donner du plaisir dans la vie sera vide et sans importance. Il n’y a rien de nouveau, puisque nous avons vu Maeve traverser le même parcours depuis quelques semaines, mais elle mentionne tout de même qu’elle ne veut pas utiliser son pouvoir pour convertir. Elle offre plutôt aux hôtes le choix de la suivre, une liberté qu’ils n’ont jamais eue. Par contre, elle n’a pas trop de remords à faire une telle chose à Bernard. Teddy croyait avoir une emprise sur le passé, mais ses souvenirs toujours changeants lui apprennent maintenant qu’il n’a pas tué des soldats, mais des innocents villageois. Wyatt s’est servi de lui comme machine à tuer.

Le parcours de Dolores n’est pas encore tout à fait clair. Il est évident qu’elle navigue entre le présent et le passé, essayant de différencier ce qui est quand, pour découvrir ce qu’elle est sensée accomplir. Depuis un certain temps, on aurait pu croire qu’Arnold la guidait, mais elle est confrontée cette semaine à la dure réalité qu’il est non seulement mort, mais de la main de Dolores. Elle a mentionné précédemment qu’Arnold lui avait demandé de l’aide, sous-entendant qu’il voulait détruire le parc – et se serait-il suicidé du même coup? Dans tous les cas, Dolores suit un parcours tracé par son passé – et Arnold – pour débloquer des souvenirs qui vont lui permettre d’accomplir la volonté d’Arnold. Sans le savoir, elle est aussi un outil, la dernière arme d’Arnold contre son ancien partenaire.

William aussi est confronté à la réalité qu’il a possiblement été manipulé émotionnellement par Dolores et le parc. L’image du ventre de la jeune hôte ouvert pour révéler de la machinerie est brutale autant pour William que pour nous. Par contre, le jeune « chapeau blanc » s’en remet rapidement et découpe plusieurs hôtes pour en comprendre le fonctionnement. Il déclare avoir finalement compris le fonctionnement du jeu, ne clarifiant pas ce que cela implique. Serait-ce son premier indice du labyrinthe? Notre enthousiasme à l’idée de voir Dolores s’émanciper est tempéré par le fait que le tout se passe 30 ans plus tôt et que nous savons qu’elle est toujours dans le parc « aujourd’hui ». Ce parcours qu’elle retrace est probablement la clé de sa potentielle libération la semaine prochaine, mais pour l’instant elle ne semble qu’être coincée dans une autre « loop ».

De plus, être un scripteur d’un tel parc, la « narrative » la plus immersive pour quelqu’un de désintéressé serait de lui faire croire qu’un des hôtes commence à développer une conscience et un libre arbitre. Ainsi dans ses vacances il n’est plus le héros d’une mise en scène western, mais un libérateur d’une épopée de science-fiction, au premier rang du développement de la première intelligence artificielle. La séduction de William fut-elle planifiée pour sauver le parc de ses problèmes financiers? Il y a beaucoup de boucles à boucler la semaine prochaine, espérons qu’ils ne laissent pas trop de mystères en suspend pour la saison à venir.

Prédiction : la saison se termine par « Ford avait tout vu venir sauf Maeve et sa révolution » OU « la révolution de Maeve fait aussi parti de l’orchestration de Ford. ».