Critique télé : Westworld S01E07 – Trompe l’oeil

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Après 5 semaines d’intrigues, nous en sommes à notre deuxième épisode de révélations. Trompe l’œil, comme son nom l’indique, mise sur le fait que nous avons d’abord été dupés pour maintenant mettre à nu les supercheries. Les motivations de chacun sont plus claires que jamais et la direction des prochains épisodes à venir se clarifie. Après le revirement de cette semaine (Bernard), il est difficile de savoir où s’arrêteront les retournements, puisqu’il est impossible d’être certain de quoi que ce soit.

Mad Hatter : “If I had a world of my own, everything would be nonsense. Nothing would be what it is, because everything would be what it isn’t.”

En prenant comme point de départ la citation du Mad Hatter que lit Bernard à son fils en introduction, l’épisode prend tout son sens. En jouant avec les attentes du public, présentant les choses d’une certaine façon pour tromper le spectateur, la perspective que nous avons sur l’univers est incertaine. Un mur est pour nous un mur jusqu’à ce que Theresa pointe une porte. Le mur devient soudainement une porte et on réalise que l’on vient de nous mentir à nouveau. Comme les hôtes, nous ne verrons ce que les autres veulent bien qu’on voit, prisonniers des décisions des créateurs de Westworld.

Les véritables origines de Bernard, combinées à ce que Ford requiert de lui, exposent une fois pour toutes que Dieu est autant divinité que démon (« You’re a fucking monster. ») Son contrôle absolu sur le parc fait de lui un omniscient créateur, mais avec sa puissance créatrice vient aussi sa pulsion destructrice. Dans son repaire souterrain, les machines donnent la vie et l’enlèvent simultanément. De sa situation de pouvoir, il ne semble pas y avoir d’arrière-pensée au meurtre de Theresa. Il est habitué de contrôler tout ce qui l’entoure et puisqu’il ne peut pas «figer » ses collègues de travail humains, il doit s’en débarrasser de la façon la plus inhumaine possible. La révélation de la nature de Bernard est présentée comme une telle tragédie, mettant de l’avant le poids émotionnel qui dévaste le pauvre protégé/hôte. Dans Westworld, Dieu et Diable ne forment qu’un être tout puissant qui manipule les autres personnages autant qu’il nous manipule.

Lorsqu’il confronte Theresa, Ford avance sa théorie que sans le fardeau des émotions humaines comme le doute, la culpabilité ou l’anxiété, les hôtes vivent une existence d’une plus grande pureté que ce que notre cerveau humain peut nous le permettre. Par contre, nous savons aussi que pour garder les hôtes dans cet état, ils doivent limiter leurs capacités intellectuelles. Évidemment, cette philosophie vient de l’homme qui contrôle tout et ne connait aucune limite, mais pour la première fois depuis le début de la série, la boucle des hôtes n’est pas qu’une contrainte affligeante dont on veut se libérer. Ainsi, croyant honnêtement bien faire, Dieu/Diable crée des humains plus libres en leurs retirant la notion de choix dont découlent les fardeaux cités plus haut.

Parlant de boucle réconfortante, William et Dolores sont de retour. Ce qui n’était qu’une théorie (mentionnée la semaine dernière) devient assez clair. Dans son discours sur le parc, William explique que son enfance fut bercée par la littérature et qu’il est grandement attiré par cette vie, baigné dans un univers narratif où tout a un sens, une raison d’être. Ce discours évoque fortement l’homme en noir qui, depuis le second épisode, dit chercher ce que cet endroit veut dire, la signification du parc, comme le propos d’une histoire. Par conséquent, celui qui semblait représenter la référence morale de la série (William) est associé très fortement à l’homme qui joue le rôle d’antagoniste depuis le premier épisode (Man in Black). Le héros et le vilain se rapprochent lentement l’un de l’autre, menant à l’inévitable point de convergence où ils ne feront qu’un – supposément.

William parle aussi de « faire semblant » dans le « vrai » monde, dans une vie construite autour d’un personnage qu’il n’est pas. L’univers fabriqué devient la réalité émotionnelle (notion qui évoque l’ « ecstatic truth » de Werner Herzog, qui veut que la vérité ne puisse parfois être obtenue qu’à travers la fabrication). Westworld permet de vivre dans un monde sans conséquence, allant au plus profond de qui l’on est vraiment lorsque tout est à notre portée et que plus rien ne nous retient. Un endroit qui n’est pas là pour satisfaire les besoins primaires, mais pour faire ressortir ce que les gens sont réellement. Sauf que, comme les révélations de la semaine qui altèrent de façon permanente notre regard sur la série, William ne peut revenir en arrière maintenant qu’il a goutté à ce qu’il est au fond de lui-même. De plus, tandis que l’humain cherche le réconfort des boucles et l’excitation du jeu, Dolores ne veut rien de plus que la banalité d’une existence humaine où les choix anodins du quotidien mènent nos vies et causent de l’anxiété, du doute et des regrets.

Prédictions : Maintenant que la porte est ouverte aux humains qui sont en fait des hôtes, combien de pourcentage des employés du parc se révéleront en fait être des hôtes? Je prédis autour de 80%. En dehors de quelques programmeurs et les postes créatifs clés, j’ai l’impression que tout ce qui est travail répétitif, de maintenance, à la chaîne, etc. sera fait par des androïdes. Ce qui fait de nos deux « bouchers » des androïdes, ainsi que la majorité de l’équipe de Theresa, peut-être même Stubbs ou Elsie.